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Suite aux expulsions de cette semaine

L’odyssée des Roms dans les rues de l’agglomération

Cette semaine, la police a évacué trois camps de Roms, à Gerland (Lyon 7) et à Saint-Fons. Au total, quelque 350 Roms, dont environ 150 enfants ont dû quitter leurs habitations insalubres. Bienvenus nulle part, ils errent depuis dans les rues, chassés à nouveau dès qu’ils tentent de s’installer quelque part. Gilberte Renard, membre de l’association Classes et infatigable défenseure de la cause rom, les a suivis ces dernières nuits. Elle dénonce le « harcèlement » du préfet. Nous publions ci-dessous son témoignage :

« Vendredi 16 septembre, 20 policiers sont venus à partir de 22h20, chasser les familles roms qui avaient monté leurs tentes ou se protégeaient sous les quelques couvertures qu’elles avaient pu emporter lors de leur départ des terrains de Saint-Fons. Parmi eux, une jeune femme près d’accoucher. Le 115, qui avait été prévenu du nombre important de familles avec enfants, a envoyé la Croix Rouge pour apporter des couvertures et de la nourriture. A cette occasion, les bénévoles ont pu obtenir des policiers de ne pas les expulser de suite. Cela a été accepté à condition qu’au lever du jour ils soient partis. Toutefois, les policiers ont tout de même, pour se sentir utile, relevé les identités de toutes les personnes.

Les familles sont finalement parties à 2h du matin avec enfants et baluchons, sachant que leurs baluchons maigrissent de lieu en lieu au gré de la fatigue. Elles sont entrées dans le terrain de la Soie à Villeurbanne où en 2006/2007 un campement avait été évacué (cinq ans plus tard, les constructions ne sont toujours pas sorties de terre...), mais la police de Villeurbanne les a expulsées dans la matinée. Et encore une fois elles se sont installées sur le trottoir en face du terrain, qu’elles ont dû quitter pour une autre destination.

Puis, ils se sont rendus sur le terrain derrière le Château d’eau à Vaulx-en-Velin en face à la voie du tram. Cachés de la route par un monticule, adultes et enfants pouvaient profiter de quelques arbustes qui faisaient de l’ombre pour se reposer. A nouveau, la police de Vaulx-en-Velin est passée pour leur dire qu’ils ne pouvaient rester sur ce terrain. Alors qu’il s’agit d’un terrain vague sans aucun bâtiment ou habitation alentour. Deux policiers sont revenus vers 15h30. Le chef nous a dit que, si dans trois-quarts d’heure ils n’étaient pas partis, il serait obligé d’appeler du renfort pour les expulser. Nous lui avons rappelé qu’il a besoin de l’accord du propriétaire pour évacuer un terrain privé. Sans succès. Les policiers nous ont fait comprendre qu’ils appliquaient des ordres venus d’en haut.

Le chef était plutôt sympa, nous avons expliqué le périple de ces familles depuis mercredi. Il leur a suggéré d’aller dans un squat à proximité, rue Catupolan, leur disant qu’il y avait de la place. Je connaissais un peu les familles de la rue Catupolan. Je les avais rencontrées ce jeudi midi, pour tâter un peu le terrain, mais j’avais bien compris qu’ils ne voulaient pas que d’autres personnes viennent. Que faire ? je dis à trois Roms qui ont l’air plutôt actifs d’y aller pour discuter avec les autres, ils me demandent de les accompagner. Il faut trouver une solution, ils ne vont pas continuer à se déplacer car ils sont tous épuisés, sans nourriture, sans eau... Arrivés rue Catupolan, nous ne sommes pas accueillis à bras ouverts. Ils discutent entre eux, j’essaie d’expliquer leur situation. Rapidement les Roms me disent “laisse, on part”.

Retour à la case de départ. Une heure plus tard, le chef policier et son collègue reviennent et s’indignent que les Roms ne soient pas partis. Ils nous informent qu’ils vont appeler du renfort pour les expulser. Effectivement un quart d’heure plus tard, une dizaine de policiers arrivent et investissent le terrain. Les familles se lèvent désespérées pour préparer encore une fois leurs sacs. Ils mettent du temps car ils sont très fatigués, depuis mercredi soir, ils ont erré de lieux en lieux sans dormir plus que quelques heures peut être, sans manger. Les policiers attendent, immobiles.

Chargés des baluchons que les hommes ont attachés, des enfants qui traînent de plus en plus, de Iona qui devrait accoucher sous peu et qui porte sa petite fille de 4 ans qui dort, ils franchissent le monticule s’aidant les uns, les autres... pour redescendre sur la route où ils vont s’installer sur le trottoir en face. Une brochette de misère sous les yeux des personnes qui passent en voiture et regardent ébahis ce spectacle inimaginable, dans une ville où à quelques mètres un spectacle de musique contemporaine se tenait avec une population urbaine aux antipodes de celle qui était installée là sur le trottoir.

Le chef de police, certainement conscient de l’image que donnaient ces familles anéanties, leur a dit d’avancer. Ils ont obéi, se sont levés pour marcher le long de la voie du tram, tels un peuple en exode, c’était à pleurer. Je restais sur place pour discuter avec des personnes qui se demandaient ce qui se passait.

Six policiers montaient la garde sur le monticule que venaient quitter les familles, pour être certains qu’ils ne revenaient pas. Je me suis approchée d’eux, et du bas du monticule je leur ai dit : “je vais vous raconter ce que les familles ont vécu depuis mercredi” et j’ai raconté très posément. Ils regardaient à droite, à gauche, pas très à l’aise. Je leur ai demandé de me regarder, un s’est retourné, un a écouté attentivement, les autres faisaient comme si cela ne les intéressait pas. Qu’importe, ils entendaient.

Puis j’apprends que les familles sont au squat de la rue Catupolan. Je n’en reviens pas. Je les rejoins. C’est la police qui les a fait entrer. Ils étaient en train de s’installer dans le hangar et en quelques minutes transportaient des planches de bois trouvées sur le terrain. Une véritable fourmilière où adultes, enfants faisaient des va et vient sous le regard désapprobateur des occupants. Car ils affirmaient que la police leur avait dit auparavant qu’ils seraient expulsés si il y avait plus de squatteurs.

Or c’est la police qui les y a installés. Un Rom nous a dit que le policier avait signifié aux anciens : “si vous ne les laissez pas entrer c’est vous qui serez expulsés”. Le chef policier nous a dit qu’ils venaient tous les lundis matin pour s’assurer que tout allait bien. Une procédure juridique est en cours, mais à ce jour il n’y a eu aucune assignation. Une solution provisoire qui ne peut perdurer du fait de l’installation très précaire des 80 nouveaux venus. Un nombre qui va encore augmenter avec l’arrivée d’autres personnes expulsées, encore dans la rue.

Toujours marcher sans avoir le droit de s’arrêter, suivis par des voitures de police ou par des policiers à pied, traînant des enfants qui pleurent, des bébés, sans rien n’avoir à manger ni à boire alors qu’il faisait très chaud. Le tout sous le regard des gens dans la rue. Ils avaient honte.

Vendredi soir, alors qu’une pluie torrentielle inondait ce secteur de Lyon, nous ne pouvions que nous dire que malgré tout, une partie des familles expulsées était à l’abri. Pourtant, c’est ce qui s’est passé ce jour là, nous ne l’oublierons pas. »

Photo : Lyon Info (archives)

Publié le : dimanche 18 septembre 2011, par Michael Augustin

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3 commentaires pour cet article


  • L’odyssée des Roms dans les rues de l’agglomération 19 septembre 2011 à08:19, par lulu

    mais nous lyonnais on ne va tout de même pas accueillir toute la misére humaine, il y en a déjà assez comme ça à lyon, surtout qu’ils se reproduisent comme les rats pour toucher des allocs, ils n’ont qu’à rentrer chez eux

  • Rocard disait "La France ne peut accueillir toute la misère du monde… mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part"
    Quelques centaines de roms à lyon c’est bien peu par rapport aux millions de réfugiés qui errent sur notre planète.
    Petit rectificatif : les familles roms dont on parle ici ne touchent pas les alloc’ et n’ont pas de chez eux vu que la Roumanie n’en veut pas non plus.

  • L’odyssée des Roms dans les rues de l’agglomération 30 septembre 2011 à11:56, par testud georges

    sauvons les "rom’s" en France

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